Bilan 2022 sur la responsabilité médicale : retour à une situation d’avant crise sanitaire

Paris, France, 29/09/2022

Après la crise du Covid, l’année 2021 a été celle d’un retour progressif aux tendances de fond constatées précédemment en matière de responsabilité médicale. Une nouvelle crise frappe le système de santé mais ne se voit pas dans les chiffres de ce bilan annuel. Elle est caractérisée par l’épuisement professionnel de bon nombre de soignants, par l’absentéisme, les démissions, les fermetures temporaires de services hospitaliers, la désertification médicale…Cette situation est préoccupante et pourrait avoir des incidences sur le risque médical dans les années à venir.

La MACSF poursuit et intensifie ses efforts d’accompagnement des professionnels de santé pour améliorer leur exercice au quotidien. Afin de construire un plan d’actions, la mutuelle lance fin 2022 une étude sur la situation des soignants (santé, pénibilité, stress, qualité de vie au travail…) basée sur des auto-diagnostics guidés. Toutes les professions de santé sont concernées : médecins, infirmiers, sages-femmes, etc. Leurs réponses seront utilisées par la MACSF pour dégager des pistes de programmes de prévention. Les résultats globaux de l’étude seront publiés en 2023.

En parallèle, la MACSF poursuit sa contribution à la connaissance des risques par le biais de son rapport annuel sur le risque médical et de ses observatoires des risques par spécialité publiés régulièrement. La mutuelle organise tout au long de l’année, avec les syndicats professionnels et les sociétés savantes, des conférences et des formations, afin d’agir efficacement sur la prévention des erreurs médicales, d’améliorer la gestion des risques et la qualité des soins.

Le rapport annuel 2022 sur le risque des professionnels de santé en France publié par la MACSF – Le Sou Médical présente les données relatives aux déclarations et procédures de l’année 2021. Il dresse un panorama de référence sur la responsabilité médicale et paramédicale. Il s’appuie sur les mises en cause de ses sociétaires et les issues des procédures auxquelles ils sont confrontés.

2021 : retour à la situation d’avant la crise sanitaire

Avec la crise sanitaire, l’année 2020 aura été une année atypique en matière de responsabilité des professionnels de santé : baisse significative du nombre de déclarations de sinistres et de décisions de justice. La comparaison des données 2021 avec celles de 2020 s’avère donc peu pertinente et nous citerons les données 2019 dans les éléments présentés pour mieux apprécier les tendances réelles.

« L’année 2021 a été marquée par un retour à la situation d’avant la crise sanitaire et même légèrement en-deçà. Si le nombre de déclarations de sinistres 2021 augmente d’un peu plus de 11 % par rapport à 2020, il reste inférieur à celles reçues avant la crise.
En matière de condamnations judiciaires, l’année 2021 est marquée par une baisse de la sévérité des tribunaux pour la première fois depuis 2017. 67 % des décisions civiles se soldent par une condamnation en 2021 contre 72% en 2020 et 71% en 2019. A l’inverse, les indemnisations allouées aux victimes par les juridictions civiles sont en nette augmentation par rapport à 2021 et demeurent supérieures à celles versées en 2019. 
Enfin, côté Commissions de Conciliation et d'Indemnisation, on retiendra une tendance plus importante à reconnaître une faute que par le passé »
constate Nicolas Gombault, directeur général délégué du groupe MACSF.

Les 6 chiffres clés sur le risque médical des professionnels de santé en 2021

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Une sinistralité 2021 en légère hausse pour les médecins

Le taux de sinistralité des médecins s’établit à 1,23 % en 2021, soit une légère augmentation de 0,08 point par rapport à 2020 (1,15% en 2020) mais en-deça de 2019 (1,53 % en 2019). Les 162 023 médecins assurés par la MACSF-Sou Médical, qui représentent 30 % du portefeuille assuré en responsabilité civile professionnelle, concentrent près de la moitié des déclarations de sinistres corporels reçues.

En valeur absolue, les trois spécialités tous statuts confondus qui ont déclaré le plus grand nombre de sinistres en 2021 demeurent les médecins généralistes (356 déclarations), les chirurgiens orthopédiques et traumatologiques (293 déclarations) et les ophtalmologistes (221 déclarations), tout comme en 2020.

Leur exposition au risque est cependant très différente avec les taux de sinistralité suivants :

  • 0,88% pour les seuls médecins généralistes libéraux
  • 48,01% pour les seuls chirurgiens orthopédiques et traumatologiques libéraux
  • 5,95% pour les seuls ophtalmologistes libéraux

Les trois spécialités libérales dont le taux de sinistralité est le plus élevé sont :

  • La neurochirurgie avec un taux de 84,48 %, en hausse par rapport à 2020 (66,38 %)
  • La chirurgie viscérale et digestive / chirurgie générale avec un taux de 72,16 % en hausse par rapport à 2020 (49%)
  • La chirurgie orthopédique et traumatologique avec un taux de 48,01 %, en hausse par rapport à 2020 (44,68%)

L’oncologie a vu son taux de sinistralité passer de 1,07 % en 2020 à 6,19% en 2021, probablement la conséquence de la découverte tardive de cancers, elle-même liée à la baisse du nombre de dépistages en période de crise sanitaire.

L’évolution de la sinistralité des autres professionnels de santé est la suivante :

  • 1 872 déclarations de sinistres pour les 29 185 chirurgiens-dentistes, soit un taux de sinistralité en hausse en 2021 : 6,41 % contre 6,05 % en 2020 (6,63 % en 2019)
  • Pour les 1 597 vétérinaires, le taux de sinistralité diminue légèrement en 2021, passant de 12,03% en 2020 à 11,96 % en 2021 (11,28% en 2019)
  • La sinistralité des 19 520 des sages-femmes est stable avec 32 déclarations contre 34 en 2020 (29 en 2019)
  • La sinistralité des 168 658 infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes demeure faible avec 200 déclarations en 2021 contre 140 en 2020 (143 en 2019)

Mises en cause des médecins : le recours prioritaire aux CCI plutôt qu’aux tribunaux se maintient

Déclarations corporelles des médecins :

Les deux principaux types de mises en cause des médecins demeurent depuis de nombreuses années :

  • Les réclamations amiables : 39 % contre 40 % en 2020 (38 % en 2019).
  • Les saisines CCI (Commissions de Conciliation et d’Indemnisation) : 34 % contre 31% en 2020 et 2019.

Les procédures civiles arrivent en troisième place avec 18 % en 2021 contre 20 % en 2020 (22 % en 2019).

Quant aux plaintes pénales et ordinales, elles portent sur de faibles volumes (4 % et 3 % respectivement).

Hausse de 20% des décisions civiles et pénales et de 85% des avis CCI

Après deux années marquées par une activité des tribunaux et des CCI fortement impactée par la crise de la Covid-19, le nombre global des décisions de justice civiles et pénales et des avis rendus par les CCI enregistré à la MACSF est en hausse de 51 % (toutes professions et spécialités confondues).

Même si le nombre des décisions de justice civiles est logiquement en augmentation par rapport à 2020, il retrouve un niveau inférieur à celui de 2019. 409 décisions de justice civiles et pénales ont été rendues en 2021, contre 340 en 2020 (soit une hausse de 20 %), mettant en cause 714 professionnels de santé et établissements de soins (581 en 2020), dont une majorité de médecins (67,5 %). Pour mémoire, 448 décisions étaient rendues en 2019.

La hausse des procédures devant les CCI a été marquée par une augmentation de 85 % d’avis en 2021 (549 avis contre 296 en 2020). Cette tendance se traduit par une hausse du nombre de poursuivis de 87 % (1 463 dont 1 390 professionnels de santé contre 784 dont 755 professionnels de santé en 2020). Pour mémoire, 535 avis étaient rendus en 2019.

Les CCI ont ainsi rattrapé leur retard après la crise sanitaire et le nombre des avis CCI redevient largement majoritaire en 2021 par rapport aux décisions de justice civiles après une inversion de cette tendance en 2020. Ainsi, les CCI ont reçu 4 159 nouvelles demandes en 2021 (3 953 en 2020 et 4 612 en 2019) (Source : Rapport d’activité 2020 de l’ONIAM).

La sévérité des juridictions civiles en recul de 5 points

La tendance à la sévérité des juges à l’égard des professionnels de santé dans l’appréciation des responsabilités observée les années précédentes jusqu’à atteindre 71% en 2019 et 72% en 2020, est en diminution de 5 points.

Ainsi, en 2021, le pourcentage de décisions prononçant une condamnation d’au moins l’un des poursuivis est de 67% alors que le nombre de décisions civiles est en hausse de 19%.

Le top 3 des spécialités médicales pour lesquelles les médecins comptent le plus grand nombre de poursuites reste inchangé depuis plusieurs années : il regroupe la chirurgie, la médecine générale et, plus loin derrière, l’anesthésie réanimation.

« La sévérité des juridictions civiles reste importante en dépit de la baisse du taux de décisions défavorables de 5 points, baisse qui sera à examiner dans les années à venir », commente Nicolas Gombault.

En 2021, les juridictions civiles ont alloué 49 M€, en forte hausse par rapport à 2020 (+ 67%), alors même que le nombre de décisions civiles progresse seulement de 19%.

20% des décisions civiles octroient des indemnisations supérieures à 100 000€ pour un total de 45 M€, soit 89 % de la charge globale des sinistres portés devant les juridictions judiciaires.

Pour mémoire, le montant des indemnisations allouées aux victimes par les juridictions en 2019 s’élevait à 42,3 M€.

Chez les médecins, les montants des indemnisations 2021 les plus élevés concernent la chirurgie, la médecine générale et la gynécologie obstétrique, tout comme en 2020 : elles représentent à elles seules 69 % du montant total des indemnités allouées aux victimes par les juridictions civiles en 2021 à la charge des médecins.

Dans la catégorie « chirurgie », c’est la neurochirurgie qui assume la plus lourde charge, détrônant cette année la chirurgie orthopédique. La chirurgie plastique reconstructrice et esthétique arrive en troisième place alors qu’elle n’occupait que la cinquième position en 2020 mais pour un bien plus faible montant.

4,5 millions d’euros : indemnisation civile la plus élevée en 2021

Les 10 plus fortes indemnisations de l’année ont concerné majoritairement des gynécologues obstétriciens, des médecins généralistes et des chirurgiens. Sur les 3 affaires ayant donné lieu aux plus fortes indemnisations de l’année, 2 concernent la liquidation du préjudice d’une victime nouveau-né. Dans les deux cas, la responsabilité du médecin a été retenue pour ne pas s’être déplacé.

L’indemnisation la plus élevée versée en 2021 a impliqué un médecin généraliste, atteignant un montant de 4,495 millions d’euros.

Ce dossier concerne un patient victime d’une absence de diagnostic d’une méningite à pneumocoques. Ce patient consulte un médecin généraliste pour des troubles gastriques et une toux au retour d’un séjour au Maroc. Le praticien diagnostique un syndrome grippal avec bronchite, associé à une flambée de reflux gastro-œsophagien. Quelques jours plus tard, le patient présente une détresse respiratoire qui le mène aux urgences, où est diagnostiquée une méningite à pneumocoques. Le patient reste atteint de lourdes séquelles.

Dans cette affaire, il est reproché au médecin plusieurs négligences : absence de prescription d’investigations complémentaires (radiographies, bilan sanguin) et absence d’orientation vers un service hospitalier alors que le praticien était sur le point de s’absenter pour les fêtes. 

Les 10 indemnisations les plus élevées allouées en 2021 s’échelonnent entre 1,074 million d’euros et 4,495 millions d’euros pour un montant cumulé de 23,950 millions d’euros.

Prison avec sursis pour toutes les condamnations pénales

Le nombre d’affaires pénales est en augmentation (13 décisions contre 6 en 2020). Même si le faible volume d’affaires pénales ainsi que les montants d’indemnisation rendent les tendances très fluctuantes d’une année sur l’autre quant à la sévérité des juges, les poursuites pénales aboutissent néanmoins à des condamnations dans 46 % des cas (50% en 2020).

Tout comme en 2020, toutes les décisions de condamnation ont comporté des peines particulièrement lourdes (jusqu’à 18 mois d’emprisonnement avec sursis). Dans toutes les affaires, les faits reprochés étaient particulièrement graves et ont donné lieu à un décès.

Plus d'avis concluent à la faute d'un professionnel de santé qu'à un aléa

Devant les CCI, le nombre des avis retenant une faute (exclusive ou cumulée avec d’autres motifs) de l’un au moins des professionnels de santé mis en cause, augmente régulièrement chaque année.

Fait marquant en 2021 :  30% des avis rendus retiennent une faute exclusive à l’encontre des professionnels de santé, indemnisable par leur assureur, alors que seulement 16% d’avis retiennent un alea indemnisable par la solidarité nationale. C’est une tendance nouvelle puisque jusqu’en 2019, la part des avis rendus retenant une faute exclusive était équivalente à celle retenant un aléa. 

Enfin, les partages faute/aléa, faute/infection nosocomiale ou encore faute/aléa/infections associées aux soins demeurent, cette année encore, très minoritaires.

 

 

 


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