Responsabilité médicale : le rapport 2021 de la MACSF marqué par la crise sanitaire

Paris, France, 28/09/2021

La crise de la Covid 19 a marqué l’année en matière de responsabilité des professionnels de santé. Elle a entrainé des mises en cause liées notamment à la téléconsultation ou à la déprogrammation d’interventions médicales. Elle a provoqué une baisse du nombre global de déclarations de sinistres, de mises en cause de professionnels de santé et de décisions de justice. Mais la sévérité des tribunaux s’est confirmée : 72% des décisions civiles se sont soldées par une condamnation. 

Le rapport annuel sur le risque des professionnels de santé en France publié par la MACSF – Le Sou Médical en 2021 présente les données relatives aux déclarations et procédures de l’année 2020. Il dresse un panorama de référence sur la responsabilité médicale et paramédicale. Il s’appuie sur les mises en cause de ses sociétaires et les issues des procédures auxquelles ils sont confrontés.  

Un nombre limité de dossiers directement liés à la crise sanitaire 

A ce jour, le volume des dossiers mettant en cause des professionnels de santé directement liés à la crise sanitaire, est limité : une quarantaine ont été ouverts. Ils concernent des pertes de chances ou des sinistres liés à la déprogrammation d’actes médicaux ou d’interventions chirurgicales. Par exemple des coloscopies et colposcopies annulées ou reportées, ce qui a entraîné la découverte tardive d’un cancer. Ils concernent aussi des cas de contamination par le virus à l’occasion des soins en Ehpad ou en cabinet de ville. Quelques déclarations de sinistres sont liées à la téléconsultation qui a connu une très forte croissance pendant la crise sanitaire et s’est parfois exercée « en mode dégradé ». Très peu de sociétaires MACSF ont été mis en cause dans un dossier lié à la vaccination contre la Covid 19 (une dizaine de dossiers). Et quelques dossiers ont été engagés par des malades ou leurs familles critiquant les soins prodigués dans le contexte de la crise sanitaire, notamment dans des Ehpad.  

« Nous avons enregistré peu de déclarations en lien avec la crise sanitaire ou consécutives à l’usage croissant de nouvelles pratiques telles que la téléconsultation. Cependant, il est encore un peu tôt pour tirer des conclusions sur les effets de la covid-19 en matière de responsabilité médicale. Nous restons vigilants et surveillons attentivement les risques qui pourraient émerger du fait de l’effet retard dans les réclamations liées par exemple à la perte de vue de patients, à des retards de diagnostic, à la découverte de pathologies ou encore à l’aggravation de pathologies chroniques », déclare Nicolas Gombault directeur général délégué du groupe MACSF. 

Une baisse des déclarations de sinistres et des décisions de justice

La crise sanitaire et le confinement ont entraîné une diminution globale de 35% des décisions de justice et des avis des Commissions de conciliation et d’indemnisation (CCI) de même qu’une baisse de 15% des déclarations de sinistres reçues par la MACSF.

« L’année 2020 a été marquée par la crise sanitaire qui a eu pour conséquences importantes la baisse du nombre des déclarations reçues par la MACSF-Le Sou Médical, la diminution du nombre de sociétaires mis en cause ainsi que du montant des indemnisations. La sévérité des tribunaux se maintient toutefois à un niveau toujours très élevé au niveau de la reconnaissance de la responsabilité des professionnels de santé mis en cause : 72 % des décisions civiles se soldent ainsi par une condamnation » constate Nicolas Gombault.

Les 5 chiffres clés des professionnels de santé

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Nombre de décisions civiles et taux de condamnation sur 10 ans 

Une sinistralité 2020 en baisse pour les médecins 

Le taux de sinistralité des médecins s’établit à 1,15 % en 2020 contre 1,53% en 2019, soit une diminution de 0,38 points. Les 156 777 médecins assurés par la MACSF-Sou Médical, qui représentent 30 % du portefeuille assuré en responsabilité civile professionnelle, concentrent près de la moitié des déclarations de sinistres corporels reçues.  

En valeur absolue, les deux spécialités qui ont déclaré le plus grand nombre de sinistres en 2020 demeurent les médecins généralistes (311 déclarations) et les chirurgiens orthopédiques et traumatologiques (294 déclarations), tout comme en 2019. 

Leur exposition au risque est cependant très différente : 

  • Le taux de sinistralité des médecins généralistes est de 0,77% 
  • Le taux de sinistralité des chirurgiens orthopédiques et traumatologiques est de 44,68% 

Chez les libéraux, la spécialité dont le taux de sinistralité est le plus élevé demeure la neurochirurgie avec un taux de 66,38 %, en baisse par rapport à 2019 (85 %). 

L’évolution de la sinistralité des autres professionnels de santé est la suivante : 

  • 1 663 déclarations de sinistres pour les 27 485 chirurgiens-dentistes, soit un taux de sinistralité en baisse en 2020 : 6,05 % contre 6,63 % en 2019  
  • Pour les 1 638 vétérinaires, le taux de sinistralité augmente légèrement en 2020, passant de 11,28% en 2019 à 12,03 % en 2020 
  • La sinistralité des 181 629 infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes et sages-femmes demeure faible avec 174 déclarations corporelles en 2020 contre 199 en 2019 

Le recours prioritaire aux CCI* plutôt qu’aux tribunaux se maintient 

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Déclarations corporelles des médecins : 

En 2020, les deux principaux types de mises en cause des médecins sont, comme en 2019 : 

- Les réclamations amiables : 40 % contre 38 % en 2019 

- Les saisines CCI* : 31 %, identiques à 2019 

Les procédures civiles arrivent en 3ème place avec 20 % en 2020 contre 22 % en 2019. 

Quant aux plaintes pénales et ordinales, elles portent sur de faibles volumes (3 % et 6 % respectivement). 

*CCI : Commission de Conciliation et d’Indemnisation 

Le nombre de décisions civiles baisse de 24%  

Dans ce contexte de pandémie de Covid-19, l’activité des tribunaux et des CCI a été fortement impactée par la crise de la Covid-19.  

Ainsi, le nombre global des décisions de justice civiles et pénales et d’avis des CCI enregistré à la MACSF, toutes professions et spécialités confondues, a diminué de 35 %

Au total, 340 décisions de justice civiles et pénales ont été rendues en 2020, contre 448 en 2019, (soit une baisse de 24 %) mettant en cause 581 professionnels de santé et établissements de soins (801 en 2019), dont une majorité de médecins (68 %).  

La baisse des procédures devant les CCI est encore plus marquée avec presque moitié moins d’avis qu’en 2019 (296 avis contre 535 en 2019). Cette tendance se traduit par une diminution du nombre de mis en cause de 43 % (784 dont 755 professionnels de santé contre 1 379 dont 1 317 professionnels de santé en 2019). 

La sévérité des juridictions civiles à un niveau inégalé 

hx8tvsugpj-php56cfp2La tendance à la sévérité des juges à l’égard des professionnels de santé dans l’appréciation des responsabilités, déjà observée les années précédentes, se maintient, malgré le contexte de la crise sanitaire. 

En 2020, la sévérité des juridictions civiles atteint un niveau jusqu’alors inégalé. Ainsi, le pourcentage de décisions prononçant une condamnation d’au moins l’un des mis en cause a atteint le taux de 72% (soit + 1 point par rapport à 2019) alors que le nombre de décisions civiles est en baisse de 24%. 

Le top 3 des spécialités médicales pour lesquelles les médecins comptent le plus grand nombre de mises en cause reste inchangé par rapport à 2019 : il regroupe la chirurgie, la médecine générale et, plus loin derrière, l’anesthésie réanimation

« Les professionnels de santé ne commettent pas plus de fautes et nous ne défendons pas moins bien nos sociétaires qu’auparavant. La sévérité croissante des juridictions civiles s’explique par l’évolution de la jurisprudence, elle-même reflet des exigences sociétales qui font peser sur les professionnels de santé des obligations de plus en plus lourdes », explique Nicolas Gombault. 

mitkg4iiw7-phpvpkkycEn 2020, les juridictions civiles ont alloué 29,5 M€, en très nette baisse par rapport à 2019 (-30%), conséquence directe de la diminution du nombre de décisions civiles. 

17% des décisions civiles octroient des indemnisations supérieures à 100 000€ pour un total de 24,526 M€, soit 83% de la charge globale des sinistres portés devant les juridictions judiciaires. 

Chez les médecins, les montants des condamnations les plus élevés concernent la médecine générale, la chirurgie et la gynécologie obstétrique : elles représentent à elles seules 64 % du montant total des indemnités allouées aux victimes par les juridictions civiles en 2020. 

Dans la catégorie « chirurgie », c’est la chirurgie orthopédique qui assume la plus lourde charge, détrônant cette année la neurochirurgie, qui occupe la 4ème position. La chirurgie générale arrive en seconde position, comme en 2019. 

L’indemnisation civile la plus élevée en 2020 : 2,7 M€ 

Si, en 2019, la moitié des indemnisations les plus élevées concernait des nouveau-nés ou de très jeunes enfants, ce sont les victimes adultes qui sont largement majoritaires en 2020 (8 cas sur 10). Dans de nombreux cas, il s’agit d’affaires dans lesquelles on déplore un retard ou une erreur de diagnostic ou de prise en charge.  

L’indemnisation la plus élevée versée en 2020 a impliqué un ophtalmologiste, atteignant un montant de 2,774 millions d’euros.  

Ce dossier concerne une patiente victime d’une infection nosocomiale, de type méningite encéphalite bactérienne qui reste atteinte de lourdes séquelles neurologiques à la suite d’une intervention consistant à remédier à l’extériorisation d’une bille en hydroxyapatite, mise en place dans la cavité sclérale pour préparer la pose d’une prothèse oculaire.  

Dans cette affaire, il est reproché à l’ophtalmologiste de ne pas avoir prescrit d’antibioprophylaxie et d’avoir manqué de vigilance devant les troubles présentés par la patiente, autorisant même sa sortie. Sa responsabilité est retenue à 25%. Parallèlement, il est reproché à l’établissement un manquement dans l’organisation des soins ayant retardé le diagnostic et la prise en charge. Sa responsabilité est retenue à hauteur de 25%. L’ONIAM doit intervenir à hauteur de 50% au titre de l’infection nosocomiale grave survenue.  

Les 10 indemnisations les plus élevées allouées en 2020 s’échelonnent entre 629 000 € et 2,774 millions d’euros pour un montant cumulé de 14,192 millions d’euros.  

Prison avec sursis pour toutes les condamnations pénales 

Le nombre d’affaires pénales est en diminution par apport à 2019 (6 décisions contre 10 en 2019). Même si le faible volume d’affaires pénales ne permet pas d’en tirer des conclusions générales quant à la sévérité des juges, les mises en cause pénales aboutissent néanmoins à des condamnations dans 50 % des cas (40% en 2019). 

Pour la seconde fois en 2020, toutes les décisions de condamnation ont comporté des peines particulièrement lourdes (emprisonnement entre 6 et 9 mois avec sursis). Dans les 3 cas, il s’agit d’affaires dans lesquelles les faits reprochés étaient graves et ont donné lieu à un décès.  

La faute demeure minoritaire dans les avis des CCI  

Devant les CCI, 36% des avis retiennent une faute (exclusive ou cumulée avec d’autres motifs) de l’un au moins des professionnels de santé mis en cause, contre 34% en 2019. 

Pour la première fois depuis 2012, le nombre de décisions de justice excède celui des avis rendus par les CCI qui représentent 47 % des décisions en 2020 (hors pénal). Bien qu’en diminution, la prépondérance des saisines de CCI par rapport aux procédures judiciaires semble cependant aujourd’hui acquise. L’explication de cette baisse tient vraisemblablement à la longue période de confinement qui a affecté les CCI, avec un redémarrage d’activité plus difficile que pour les tribunaux. 

ihsjc3gmw7-phpx8xrtz24 % des avis rendus retiennent une faute exclusive à l’encontre des professionnels de santé, indemnisable par leur assureur. Seuls 19 % des avis retiennent un aléa indemnisable par la solidarité nationale. 

Enfin, les partages faute/aléa, faute/infection nosocomiale ou encore faute/aléa/infections associées aux soins demeurent, cette année encore, très minoritaires. 

 

 

Pour aller plus loin  

  • Le dossier de presse avec la présentation de la conférence de presse, des infographies à télécharger, des photos et l’intégralité du rapport sur le risque des professionnels de santé :  le dossier de presse complet

  • Le rapport 2021 sur le risque des professionnels de santé avec toutes les statistiques de la sinistralité en responsabilité civile professionnelle : le rapport intégral 

  • Retrouvez les actualités de la responsabilité professionnelle des professions de santé : https://www.macsf.fr/responsabilite-professionnelle 

  • Lire la Revue Responsabilité, éditée par la MACSF depuis 20 ans : Revue Responsabilité MACSF 

Nicolas Gombault, directeur général délégué du goupe MACSF commente les principales conséquences de la crise sanitaire sur la responsabilité des professionnels de santé. Il détaille en particulier l'impact de l'essor de la téléconsultation sur la sinsitralité. 

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